Leyla, prescris-moi un remède à l’insomnie. (1)
Viens me voir à l’aube, quand la nuit se ternit.
Je lui ai demandé: Fais-moi don d’un baiser.
Pour calmer ma passion. D’un air désabusé,

Dissimulant une pudeur qui la gênait,
Elle me dit: Que faire pour nous pardonner?
Le Livre Sacré ne l’a-t-il pas interdit,
Sauf pour le seul mari que le sort nous prédit?

L’amant et le mari vivent en harmonie
Sans que l’un ou l’autre se couvre d’infamie.
Un tel argument ne me convainc pas, dit-elle,
Tu n’es pas très prudent, à en faire de belles.

Embrasse-moi, lui ai-je dit, sans rechigner,
Je vais bientôt mourir. Mon arrêt est signé.
Elle me répondit: Pour crever de dépit,
Ne crains aucun danger d’aller de mal en pis.

Je me prépare, dis-je, pour un long voyage.
Et elle d’enchaîner: Sans retour, c’est plus sage.
Va où bon te semble. Mets fin à tes avances,
Ne sois pas possédé par autant d’insistance.

Je souffre, dis-je, d’une grave maladie.
Mon corps en est meurtri. Elle me répondit:
Prie Dieu pour guérir, c’est un voeu qui m’est cher.
Mais, pour te dire vrai, ainsi tu te pervers.

Comment peux-tu juger mon état de santé?
Il se lit sur tes traits que tu dis affectés.

(1) Inspiré d’un chant de la musique andalouse.